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D'Alan Esguerra, responsable de la stratégie de secteur
J'ai eu la chance de pouvoir assister à l'International Standards Summit de BuildingSMART qui s'est tenu à Montréal en octobre. En tant qu'ingénieur ayant travaillé dans le monde de la conception aux États-Unis, j'évalue quelles conférences sont susceptibles de me donner l'avantage concurrentiel qui me permettra de remporter le grand projet suivant. Cette conférence était toutefois différente. Il s'agissait d'acquérir des connaissances, mais aussi de contribuer à l'orientation et au développement d'une norme de données ouverte.
La communauté internationale BuildingSMART partisane des normes de données ouvertes, telles que le format IFC, est très prometteuse pour l'avenir. Cette conférence a mis l'accent sur les progrès considérables réalisés au cours des dernières années, avec des cas d'utilisation éprouvés dans de nombreux secteurs. Cette conférence a non seulement célébré ce que d'autres secteurs font de la norme IFC, mais elle a aussi été une formidable occasion d'écouter les participants et de faire entendre sa voix sur des sujets variés. Les participants aux ateliers contribuent à renforcer le mouvement en faveur de l'openBIM et des normes de données ouvertes. J'ai été profondément marqué par les opinions déterminant les priorités, par l'attitude ouverte et compréhensive des participants, de même que par la volonté de chacun de partager sa vision de l'avenir. Nous n'étions plus des propriétaires, des consultants, des entrepreneurs ou des vendeurs. Nous étions membres d'une communauté travaillant ensemble pour faire progresser notre secteur. Pour ce qui est du transport, je souhaitais connaître les progrès de l'IFC en tant que format de norme ouverte, savoir où il est requis en tant qu'élément livrable et comment il est actuellement utilisé dans le monde réel (pas dans le cadre d'un projet pilote, pas en théorie ni sur les pages d'une thèse, mais en pratique).
J'ai été surpris d'avoir la réponse à certaines de mes interrogations dès les premières heures de la session d'ouverture. En bref, le format IFC est en développement continu et est principalement utilisé dans le secteur vertical. Son utilisation sur le marché horizontal est minime en comparaison, mais elle est en constante augmentation.
Nouvelles compétences requises
Ce format est exigé par certaines agences dans le monde, mais dans quel but exactement ? Certains utilisent l'IFC car ce format permet d'entrer facilement des données et leur attribution pour obtenir une géométrie de modèle. L'attribution des données peut nécessiter beaucoup d'efforts. De moins en moins de dessinateurs entrent dans le secteur de la conception routière. Par ailleurs, le nombre de dessinateurs partant à la retraite ou quittant la profession est en hausse. Le concepteur doit donc s'acquitter seul des tâches de conception détaillée, de modélisation et de dessin. Imaginez le scénario si une attribution de données considérable est également requise. Je pense que cela pourrait ouvrir la voie à une nouvelle (ou presque) profession au sein de notre secteur.
Actuellement, l'attribution des données sur les projets 3D est principalement gérée par le concepteur. L'effort nécessaire pour ajouter ces données tout au long du cycle de vie des actifs augmentera parallèlement à l'expansion des besoins des agences. La technologie peut parfois contribuer à cet effort, par le biais de l'automatisation et de l'optimisation des workflows. Elle peut aussi nécessiter que le concepteur ou une tout autre personne développe une nouvelle compétence.
Comme je m'y attendais, la plupart des participants avec lesquels j'ai discuté travaillaient dans le secteur vertical. Certains étaient consultants BIM, d'autres entrepreneurs ou concepteurs. Je me souviens d'une conversation avec une conceptrice qui travaille à présent pour un entrepreneur. Je lui avais demandé : « Comment utilisez-vous le format IFC actuellement ? »
Elle a répondu : « Nous ne l'utilisons pas. Nous le faisions auparavant. Principalement pour la coordination et pour garantir une certaine uniformité entre les éléments livrables. »
« Qu'utilisez-vous alors maintenant ? »
« L'application de création d'origine », a-t-elle répondu. « L'IFC a été très utile pour la coordination, jusqu'à ce que nous apprenions vraiment à utiliser directement les données. Nous avons beaucoup plus de flexibilité pour apporter des modifications si nécessaire et tirer parti de l'intention de conception. » L'intention de conception décrit la relation entre les objets de conception de sorte que toute modification d'un objet est automatiquement propagée ailleurs.
Je paraphrase probablement une partie de la conversation, mais je ne cesse d'entendre que le format IFC peut véhiculer l'intention de conception (ou le fera bientôt). Si cela peut devenir un jour une réalité, ce n'est certainement pas pour tout de suite. Par ailleurs, j'entends souvent que les conversions de type round-trip ou qu'un fichier IFC assurent la sécurité, permettant ainsi de « signer et de sceller » le fichier, ce qui est faux.
Messagerie
Lors de la séance plénière d'ouverture, Marek Suchocki d'Autodesk a évoqué l'histoire de la technologie openBIM, comment Autodesk la soutient et, plus important encore, a parlé de certains des défis de messagerie posés par l'IFC. Situation plutôt particulière, je me suis vu être en accord avec une conférence d'Autodesk. Même si nous sommes concurrents, nos efforts pour faire progresser le secteur et améliorer l'environnement bâti de demain nous réunissent.
La valeur actuelle de l'IFC se situe essentiellement dans le secteur vertical et dans certains travaux horizontaux réalisés avec les versions ultérieures (IFC 2×3, publiées en 2006 et 4, publiée en 2015). Avec la version 4.3.1.0 en attente de certification ISO (la version 4.3.0.0 a été renvoyée avec des commentaires), nous avons à présent la possibilité de développer l'IFC dans le cadre de projets ferroviaires, routiers et autoroutiers.
La plupart des personnes que j'ai rencontrées publient au format IFC à la demande d'une agence gouvernementale ou d'un propriétaire, ou pour la coordination de modèles de tiers. La coordination des modèles, l'analyse, les audits et l'avant-métrage peuvent être réalisés avec l'application de création native. Par exemple, une simple référence de Revit, SketchUp et d'autres fichiers 3D dans OpenRoads Designer peut être instantanément affichée et coordonnée dans une vue de type 2D, profil, coupe transversale et 3D ou dans des feuilles. Pourquoi publier au format IFC ? Parce qu'il est ouvert.
Bien que nombreux sont ceux qui choisissent d'utiliser des applications IFC payantes, il serait en théorie possible de développer des outils gratuits pour mieux utiliser l'IFC. Personnellement, je n'ai rencontré aucun outil gratuit qui fasse plus que visualiser un modèle sous forme de belle image avec des requêtes de données manuelles. Tous les outils dont les fonctionnalités valent la peine d'être utilisées nécessitent de débourser une certaine somme d'argent.
L'élément le plus intéressant de la présentation de Suchocki a été une diapositive sur les limites de l'openBIM montrant que l'IFC complète les formats et solutions natifs, mais ne les remplace pas. L'IFC fonctionne très bien pour les bâtiments, mais les informations géospatiales font défaut. Des efforts sont actuellement déployés pour associer l'IFC à CityGML/SIG afin de résoudre ce problème. D'autre part, le format IFC n'est pas sécurisé. Il n'existe aucun moyen de signer et de sceller un fichier IFC. Les applications de création natives permettent, quant à elles, de sceller un fichier à divers niveaux. Un format reprenant l'objectif de la signature originale et du sceau d'un ingénieur, comme c'est le cas d'un fichier DGN de Bentley, peut contenir des certificats de sécurité et verrouiller les données contre toute modification. Toutefois, des efforts sont actuellement déployés pour mettre au point une sorte d'enveloppe pouvant être signée et scellée. Des données ou des fichiers peuvent être stockés dans cette enveloppe, qui peut verrouiller tout ce qui s'y trouve. Cette technologie est indépendante de l'IFC. Il est prévu d'intégrer la sécurité dans les versions futures de l'IFC.
L'idée couramment répandue que le format IFC peut prendre en charge l'exportation d'une conception vers une autre est également fausse. Le concept de « conception à conception » implique de développer un modèle dans OpenRoads, de publier un IFC, puis d'importer ce dernier en vue d'une conception continue et transparente dans Civil3D, ce qui ne se produira probablement pas.
Une fois qu'un outil de création crée un modèle et qu'un IFC est publié, vous ne pouvez pas utiliser ce dernier et recréer la conception depuis le début. La conversion de type round-trip, comme on l'appelle souvent, nécessite une capacité de définition bien plus importante que celle actuellement fournie par un IFC publié. La manière dont chaque élément géométrique est calculé et dessiné, tout comme la manière dont chaque algorithme extrude un objet, diffèrent d'une application de création à une autre. L'IFC a toujours été un instantané publié d'un produit terminé avec attribution de modèle. Il ne s'agit pas d'un fichier dynamique en continu. Il ne peut pas être utilisé pour poursuivre l'intention de conception dans d'autres applications. D'autres aspects, comme la conception paramétrique, nécessiteront également beaucoup d'efforts.
Suchocki ajoute que « l'IFC n'est pas nécessairement synonyme de délais réduits et de simplicité accrue. Il peut, au contraire, compliquer les processus et nécessiter de nouvelles compétences. » Nous le constatons actuellement. Il était certainement rafraîchissant de voir dans une diapositive précédente les valeurs et les critiques de l'IFC. L'une de ces dernières est que les fichiers sont trop volumineux. J'ai eu l'occasion de voir un petit projet routier dont la taille de fichier était 10 Go. C'est pourquoi de nombreuses applications divisent désormais une conception spécifique en plusieurs fichiers.
« Cette technologie ne compense pas le manque de planification et ne garantit certainement pas une expérience cohérente pour tous les utilisateurs. » C'est vrai pour tout, en fait. La technologie et les normes ne sont que deux pièces du puzzle très complexe qui permettra de résoudre les problèmes d'infrastructure de demain.
Bien que l'IFC présente de nombreux avantages potentiels, il est important de parler de ses limites réelles et de diffuser un message cohérent afin que le développement de ce format ne soit pas entravé ni détourné par l'échec de fausses promesses.
L'IFC dans les produits de Bentley
J'ai mentionné dans le dernier article l'engagement de Bentley auprès de BuildingSMART et sa prise en charge des nombreuses itérations du format IFC dans presque tous ses produits de plateforme. Contrairement à certains avis, IFC n'est pas un concurrent des solutions de Bentley. Nous continuons à soutenir l'IFC aujourd'hui, comme nous l'avons fait jusqu'à présent, et ne prévoyons pas d'arrêter de sitôt. Nos solutions desktop et nos solutions basées sur le cloud prennent en charge entre cinq et huit versions différentes de l'IFC. Avec la version 4.3.1.0, nous espérons faire le ménage et nous concentrer sur une norme officielle (selon notre meilleure estimation). Notre meilleure estimation est qu'il ne s'agit pas encore d'une norme officielle. Nous espérons sincèrement qu'elle le sera bientôt.
Comme dans la dernière version d'OpenRoads Designer, de nouvelles fonctionnalités et une convivialité accrue permettront d'optimiser l'application de données aux modèles en vue d'une exportation IFC. Cependant, comme pour toutes les applications desktop, le délai entre le développement, la publication, l'utilisation et le retour d'information peut s'étendre à plusieurs mois, voire plusieurs années.
Lors d'une conférence précédente, quelqu'un avait demandé : « En tant qu'ingénieur des ponts et chaussées aux États-Unis, quand puis-je m'attendre à ce que l'IFC devienne un élément livrable requis dans le cadre de projets ? »
Il s'agirait d'un processus itératif, testé par des agences gouvernementales, puis imposé, probablement au cas par cas, avant d'être largement accepté. Plusieurs années pourraient s'écouler avant que l'IFC soit imposé en tant qu'élément livrable utile à l'ensemble des projets dans le cadre des contrats des Départements des Transports des États. Nous nous attendons actuellement à ce que la certification ISO soit obtenue dans le courant de l'année prochaine (nous espérons bien entendu que les mises à jour futures seront plus rapides). D'ailleurs, le schéma actuel soumis à la certification ISO ne contient pas certains éléments, tels que les drains de tempête. Pendant un certain temps encore, tout le monde devra continuer à détourner les canalisations CVC de bâtiment pour les utiliser dans les canalisations d'infrastructure.
Contrairement au cycle de développement de produit typique, Bentley propose également l'exportation IFC par le biais de ses services iTwin . Nos services iTwin étant basés sur le cloud, les mises à jour du schéma peuvent être effectuées en quelques jours ou semaines et publiées instantanément sans téléchargement et installation fastidieux du logiciel. Autre avantage, l'exportation IFC peut être un modèle entièrement fédéré provenant de plusieurs fournisseurs. Cela garantira une exportation propre et cohérente. Au lieu d'une application desktop unique produisant l'IFC à partir de ses seules informations propriétaires, iTwin peut être l'agrégateur des informations avant l'exportation IFC. Nous travaillons à l'amélioration de la prise en charge IFC sur desktop et dans le cloud, et développons activement des moyens d'améliorer l'IFC plus rapidement.
Pour ma part, je pense que l'IFC a l'étoffe d'une grande omelette, mais nous sommes encore en train de casser quelques œufs pour y parvenir. Les personnes présentes à cette conférence sont parmi les plus passionnées, les plus intelligentes et les plus travailleuses que j'aie jamais rencontrées, toutes œuvrant pour un meilleur avenir de l'environnement bâti. Si vous avez un jour la chance d'y assister, je vous le recommande vivement. La prochaine conférence BuildingSMART se tiendra à Rome du 27 au 30 mars 2023.